Quels sont les sujets d’expertise des chercheurs de Télécom SudParis, école de l’Institut Mines-Télécom, dans le domaine de la biométrie ?
Bernadette Dorizzi : A Télécom SudParis, nous développons des algorithmes pour reconnaître les personnes par des modalités telles que le visage, l’iris, les veines de la main. Les recherches actuelles sont orientées vers des contextes d’images dégradées. En effet, lorsque les contraintes imposées à l’utilisateur diminuent (allongement de la distance entre l’il et la caméra, imprécision de la position du doigt sur le capteur), les images obtenues sont de moindre qualité. Les nouveaux algorithmes en tiennent compte et permettent une reconnaissance des images en dépit de cette dégradation.
Une autre thématique concerne la détection des attaques au niveau des capteurs, tels que l’usage de faux doigts pour les empreintes digitales, de lentilles sur l’iris ou d’images de visage. Pour cela, nous démarrons des travaux très prometteurs sur les techniques de tomographie optique cohérente (OCT), qui sont des techniques d’acquisition d’images 3D non invasives et sans contact.
Enfin, nous regardons de manière plus spécifique les relations entre biométrie et vidéo : identification de personnes dans des foules, indexation par vidéo.
Quels sont les projets de R&D en cours ?
BD : Nous sommes partenaires de nombreux projets nationaux et européens. Au niveau national, nous participons à des projets ANR (Agence Nationale de la Recherche) comme METHODEO, dont le but est de mettre au point une méthodologie de description de scènes dans une vidéo, ou IRISEM, un projet de recherche sur l’iris en mouvement.
Nous sommes également impliqués dans JULIETTE, un projet financé par le FEDER (Fonds Européen de Développement Régional), dans le domaine de la santé. Il a pour objectif d’améliorer la communication entre un robot humanoïde de service et son utilisateur humain, en dotant le robot d’un certain sens de l’observation. Les équipes de Télécom SudParis travaillent sur la reconnaissance du geste et de l’activité.
Citons enfin deux projets européens ITEA (Information Technology for European Advancement): IDEA4SWIFT dans lequel Eurecom, une autre école de l’Institut Mines-Télécom, est également impliqué et PRI-BIOSEC. Le premier a pour but d’uniformiser les systèmes d’accès aux frontières des voyageurs fréquents, en utilisant les normes du passeport biométrique. Le second vise à développer des systèmes de chiffrement capables de protéger les données biométriques contre d’éventuelles utilisations frauduleuses.
Quels seront demain les usages de la biométrie dans nos sociétés au-delà de la simple identification des personnes ?
BD : L’une des problématiques de la biométrie est de parvenir à sécuriser les données personnelles. Or, cet enjeu est crucial pour le commerce en ligne, par exemple. Nous venons de signer un contrat important avec PW Consultants. Ensemble, nous allons travailler à la sécurisation des transactions commerciales sur Internet pour réduire les fraudes à la carte bancaire.
Dans un proche avenir, les techniques de biométrie seront utilisées dans les domaines de la cybercriminalité et de la cyberdéfense. Elles permettront, grâce à des techniques de détection de formes semblables utilisées couramment en biométrie, de retrouver des événements similaires dans des flux vidéos, et donc de ré-identifier des personnes, de détecter des intrusions Ces techniques serviront également à l’indexation de séquences vidéo.