Les résultats de leur étude montrent que le nombre de téléchargements illégaux a baissé de 71% depuis l’adoption de la loi. Pour autant, les échanges de fichiers P2P dépendent de certains acteurs clés du réseau, les éditeurs, qui mettent à disposition sur le système des fichiers sous copyright. L’étude démontre ainsi qu’au cours de la 1re année d’application de la loi, le nombre de contenus mis en ligne depuis la France a augmenté de 18 %.
Ce phénomène s’explique par le fait que les éditeurs professionnels BitTorrent ont trouvé un fournisseur accommodant, par lequel ils ont pu développer leur activité en bénéficiant d’un niveau de risque très faible.
« La loi Hadopi n’a pas pris en compte le fait que l’échange de fichiers P2P est un marché mondial, de sorte que même lorsque l’on parvient à réduire les téléchargements au niveau local, les utilisateurs hébergés dans un pays peuvent toujours alimenter en contenus le reste de la planète » explique Noël Crespi, chercheur à Télécom SudParis.
L’échange de fichiers P2P met en relation deux acteurs : le consommateur et l’éditeur.
Pour les chercheurs de l’étude, ni la commission Hadopi ni aucune étude scientifique antérieure n’a analysé dans quelle mesure l’application de la loi Hadopi a contraint les éditeurs mettant en ligne des contenus depuis la France à cesser leur activité. Les résultats [1] montrent en effet qu’après la première année de mise en application de la loi Hadopi, le nombre de téléchargements a baissé de 71% et que le nombre d’éditeurs quotidiens mettant en ligne des contenus depuis la France a diminué de 46%, mais que de façon surprenante, le nombre de contenus mis en ligne avait augmenté de 18% durant cette période.
D’une part, la diminution du nombre d’éditeurs quotidiens reflète le fait que la plupart des éditeurs étaient en réalité des consommateurs qui publiaient de façon occasionnelle des contenus, lesquels ont donc quitté le système car la loi ciblait les consommateurs. D’autre part, l’augmentation du nombre de contenus publiés depuis la France s’explique par le fait qu’on y trouvait une solution d’hébergement « favorable au P2P » (comme les études d’autres chercheurs l’ont montré [2, 3]), par laquelle quiconque pouvait louer de puissants serveurs et des connexions Internet haut-débit (deux éléments nécessaires pour alimenter le système de façon professionnelle) et qui a su attirer les éditeurs P2P professionnels.
Ces éditeurs professionnels ont mis en ligne d’énormes quantités de contenus tout en exploitant leurs propres sites Internet et en en retirant des bénéfices conséquents. Ces éditeurs ciblent les consommateurs du monde entier et pas seulement les consommateurs français. Ainsi, ils basent leur activité là où les modalités d’exercice sont les plus simples.
Par conséquent, les résultats de l’étude démontrent que si la loi Hadopi a permis de réduire le nombre de téléchargements, elle n’a pu empêcher que des éditeurs professionnels alimentent les systèmes P2P depuis la France.
Retrouvez la publication scientifique complète sur « Investigating the Effect of Anitpiracy Actions on Online Piracy »