Vers les communications quantiques
Les réseaux quantiques sont appelés à jouer un rôle croissant dans le secteur des télécommunications. L’un des enjeux est d’intégrer ces technologies de rupture, avec leurs spécificités, dans les infrastructures numériques actuelles et à venir. C’est ce à quoi s’attache l’équipe du Professeur Djamal Zeghlache, enseignant-chercheur à Telecom SudParis.
L’essor du quantique
L’application de la physique quantique aux télécommunications constitue une véritable révolution. Les technologies de communication quantique vont apporter plus de sécurité et de protection des données et des échanges. Fondés principalement sur les réseaux hauts débits, la 5G, puis sur la 6G, les réseaux de télécommunications de demain vont donc intégrer naturellement les réseaux quantiques. Mais cette intégration dans des réseaux « multipoint à multipoint » de liaisons optiques point à point, hautement sécurisées, ne va pas se faire en un claquement de doigt.
Pour y parvenir, il va d’abord falloir maîtriser les piliers de ces technologies :
- le niveau physique, qui correspond à la communication des signaux sur un support optique, avec des effets quantiques d’intrication, qui lui assurent l’inviolabilité (il est impossible d’intercepter le signal sans le perturber) ;
- les capteurs « quantum sensing » et la métrologie quantique « quantum metrology » : mesure des états, flux, conditions) ;
- les aspects calcul et sécurité.
Ces possibles ruptures font l’objet d’une compétition mondiale impliquant à la fois les États et les géants du numérique. Des sources de financement européennes et nationales leur sont consacrées. L'ambition de peser sur ces sujets se traduit par le plan France 2030 et par des appels à projets liés à la souveraineté, qui sont gérés par la BPI, la DGE et l'ANR, tels que le PEPR Quantique.
Télécom SudParis et le déploiement du quantique
Le déploiement des communications quantiques fait depuis plusieurs années l’objet de recherches au sein des laboratoires de Télécom SudParis en s'appuyant sur les sources de financement mentionnées ci-dessus ou d'autres liées à l'évolution des réseaux, tels que le PEPR Réseaux du futur.
« À Télécom SudParis, nous nous intéressons à l’intégration des technologies quantiques dans les réseaux existants et futurs, précise Djamal Zeghlache. Nous nous focalisons sur l’interface entre les systèmes actuels et les réseaux quantiques, de manière à ce que ces derniers puissent apporter de manière satisfaisante les propriétés de sûreté et de sécurité qui leurs sont inhérentes. »
L’enjeu est de définir et d’optimiser ces interfaces, en tenant compte des contraintes techniques spécifiques au quantique, notamment pour élargir l’inviolabilité qu’apporte cette technologie. Notre travail concerne donc l’intelligence des réseaux et leur capacité d’adaptation à des utilisateurs quantiques (notamment des applications) distants et distribués.
L'un des objectifs est de mettre à disposition des infrastructures sécurisées, indépendantes et isolées, mais offertes par des infrastructures d’hébergement partagées. Pour ce faire, il est envisagé de passer par la distribution de clés quantiques (Quantum Key Distribution), qui est sans doute le volet technologique le plus avancé dans le domaine des communications quantiques. Cette technologie permet l'échange d'une clé cryptographique entre deux parties distantes en s'appuyant sur les principes de la physique quantique. Elle pourrait commencer à être mise en œuvre et déployée dans les 5 ans. Les autres axes suivront progressivement, plutôt dans un horizon de 10 à 20 ans.
L'intégration des réseaux quantiques dans les réseaux existants implique d'adapter les plans de contrôle des infrastructures et de gestion des services associés aux plans d’acheminement, lesquels assurent la transmission de l’information de bout en bout dans les réseaux. Ce schéma général comprend des protocoles, des mécanismes de routage ; de commutation et de gestion des nœuds et des liaisons. Techniquement, le déploiement de réseaux quantiques revient à résoudre des problèmes d’extension et de modification de graphes et d’allocation de ressources.
Au-delà du déploiement des réseaux quantiques, Télécom SudParis travaille sur la globalité du cycle de vie des réseaux, leur contrôle et leur gestion, la modélisation de leur évolution et l'automatisation des fonctions associées. Ces travaux passent par des collaborations pluridisciplinaires avec des équipes de Télécom SudParis, de l'Institut Mines Télécom ou d'autres institutions, notamment sur des projets transverses.
« Les solutions algorithmiques innovantes que nous pouvons apporter pour rendre les réseaux plus configurables, interopérables et sûrs peuvent éventuellement être transférées à des industriels, conclut Djamal Zeghlache. Dans tous les cas, nous œuvrons à un développement sans entrave de ces technologies, qui revêtent une importance stratégique pour la souveraineté technologique du pays. »
Djamal Zeghlache
Professeur, Directeur de département
Département RS2M Réseaux et Services Multimédia Mobiles
djamal.zeghlache@telecom-sudparis.eu
